Un enfant qui médite ? C’est possible !
Par Mélusine Martin, conteuse, ancienne responsable du Centre de Vipassana de Louesme
« Observez l’air qui entre et l’air qui sort à la base de vos narines, comme le gardien vigilant d’un château qui voit chaque personne qui entre et chaque personne qui sort… »
Enseigner la méditation aux enfants est un régal. Un régal d’humilité. On leur demande quelque chose de simple, d’observer la respiration naturelle à la base de leurs narines, et on les voit gigoter dans tous les sens, ouvrir les yeux, se gratter le nez ou les oreilles, tripatouiller leurs mains, leur coiffure et que sais-je encore. Pendant 2 jours, ils participent à des sessions de 20 mn réparties en 7 fois dans la journée. Quel combat pour eux ! Nous, les enseignants, on ne peut que les regarder, leur donner quelques conseils, mais c’est leur chemin : un chemin pour trouver le calme et la concentration.
Entre les sessions…
Heureusement qu’il y a le badminton, le diabolo, le bâton du diable, les perles, la peinture et les scoubidous pour s’amuser ou encore les copines et les copains pour rigoler et jouer. On leur demande toutefois de ne pas se battre, de ne pas avoir des jeux de guerre, ni des jeux avec des gagnants et des perdants ou des jeux de contact : cela les exciterait trop, beaucoup trop pour retourner ensuite dans le hall de méditation, observer l’air qui entre et l’air qui sort naturellement, à la base de leurs narines. Car il faut un peu de calme en soi pour arriver à faire cette chose a priori si simple que d’observer sa respiration naturelle pendant 20 minutes (demandez à des adultes ou essayez vous-mêmes… C’est un défi pour nous tous). Ces deux jours passent vite, très vite : les repas, les goûters, les méditations, les activités physiques, artistiques et manuelles…
Une conscience accrue
Les sessions sont proposées à des enfants de 8-11 ans et à des ados (12-18 ans). Les discussions peuvent alors devenir très philosophiques et très riches car ils sont en recherche de repères. Elles s’animent à l’occasion avec les adultes. Le plus important reste néanmoins la pratique, l’expérience par eux-mêmes de l’observation de la respiration naturelle. Et de la conscience qui va en découler. Une conscience accrue d’eux-mêmes et du monde qui les entoure. Nous avons eu de très beaux retours concernant les bénéfices de la méditation sur leur attitude générale. Ils deviennent plus calmes, plus concentrés. Les parents les trouvent changés. Pas tous bien sûr, et différemment, mais cela amène quelque chose dans leur conscience. Et un nouvel endroit où se poser : la base de leurs narines, perçue grâce aux allers-retours de la respiration naturelle qui est toujours avec eux, du jour de leur naissance jusqu’à celui de leur mort. La perception de cette respiration peut devenir une amie infaillible, pour se retrouver et pour clarifier son esprit. Un enfant m’a parlé de sa peur de l’avion quand il en a pris un pour la première fois. Il a observé sa respiration sur son siège de passager et la peur est passée ! Une institutrice m’a raconté comment elle utilisait l’observation de la respiration naturelle avec ses élèves le matin quand ils arrivent en classe. Les enfants présentant un handicap peuvent aussi en bénéficier. Récemment, nous avons accepté en cours une jeune fille adolescente porteuse d’une trisomie 21. Et même si sa concentration est encore au stade de la petite pousse, à 15 ans, elle a goûté quelque chose qui lui parle et la touche.
C’est une grande joie que d’être auprès de ces enfants qui pendant tout un cours n’auront cessé de gesticuler dans tous les sens et que l’on revoit le cours d’après, stables et immobiles comme des petits bouddhas. Ils ont passé un cap. Mais cela ne nous appartient pas, ils ont fait leur chemin. Et nous, nous les accompagnons, un peu, un tout petit peu.
Centre de Méditation Vipassana Dhamma Mahi www.mahi.dhamma.org