Vivante !
Un monde à réinventer
« On ne peut faire l’économie d’être vivant. » Robert Jaulin
VIVANT. Quelle force, quel souffle, dans ce simple mot ! « Je suis vivante » : quelle affirmation ! Que veut-elle dire ? Être vivant, c’est être en train de vivre. D’une certaine manière, c’est l’action de vivre. Bien sûr, la vie me traverse toujours, et elle n’a pas à m’attendre pour ça. Mais quand je choisis de devenir actrice de ma vie, un espace en moi se transforme, une maturité consciente s’installe. Je chevauche ma vie, je la surfe. Elle me guide et je la guide. On peut dès lors se poser la question : qu’est-ce qui me fait vivant ? A quel moment est-ce que je deviens acteur/actrice de ma vie ? Quand ce ne sont plus simplement les énergies qui m’animent mais que je me mets consciemment à animer ces énergies. Quels comportements en découlent alors ?
J’ai une proposition. Nous pourrions peut-être choisir de devenir plus créatifs. Et créer, ce n’est pas simplement peindre, sculpter ou composer. C’est créer tout le temps, à chaque instant. C’est sans cesse réinventer. Oui, mais réinventer quoi ? Ma vie. Certains l’on fait ou le font très bien. Je crois profondément que ce monde, notre société, est à réinventer. Nous nous sommes reposés gaillardement sur des codes que nous bousculons avec difficulté. Les années 1970 ont participé au changement des mentalités, mais les codes familiaux, par exemple, restent encore aujourd’hui très actifs. La plupart d’entre nous ne se pose même plus la question de savoir s’il aspire à autre chose, s’il n’existerait pas d’autres formules. La conception d’une famille au centre de laquelle se retrouve un père, une mère et des enfants est très récente, et c’est une conception particulièrement occidentale. Peut-être serais-je plus heureux en vivant à trois, à quatre, à douze ? Ma plénitude se situe peut-être dans cet espace de vie. Comment savoir, si je ne me pose même pas la question et si je ne me permets pas d’entrevoir cette réalité ? De nombreuses tribus dites « primordiales » laissaient l’éducation des enfants aux frères, aux tantes, aux « voisins ». L’espace tribal offrait ces possibilités. Nous nous sommes enfermés dans des maisons et des immeubles en oubliant cette réalité tribale intrinsèque à la nature humaine.
Je rappelle que la tribu n’est pas un manque de civilisation. Si le mot est issu du latin tribus et signifie : « division du peuple romain », il est aussi issu de tribuere, qui signifie : « distribuer », « attribuer », « partager ».Vivre en tribu, c’est donc vivre en partageant. Intéressant. Car chacun d’entre nous cherche sans cesse des tribus qui ont des centres d’intérêt à se partager : Qi Gong, Yoga, Wushu, ou Feng Shui. Le système tribal serait peut-être celui auquel nous aspirons tous, mais que nous avons cessé d’envisager. Comme nous l’enseigne le Tao, rien ne devrait pourtant rester figé. Alors ne figeons pas nos vies, et décidons d’inventer, d’être vivants. Une amie me disait récemment : « Je prends le risque d’aimer ». Aujourd’hui, je prends le risque d’inventer ma vie.